15e DIMANCHE Du Temps Ordinaire 2023 (A)

16 juillet 2023

  • Frère Philippe-Marie VAGANAY Frère Philippe-Marie VAGANAY

INTRODUCTION :

« Que vive mon âme à te louer ! » Aujourd’hui, c’est un jour où nous avons, dans notre communauté, un motif de louer le Seigneur, puisque c’est le 52ème anniversaire de la première messe célébrée dans notre communauté. Nous datons notre fondation justement par cette première messe, au jour de la fête de Notre Dame du Mont Carmel.

Et puis, c’est aussi l’anniversaire de profession de deux de nos frères : Frère Ronan et Frère Ambroise. Voilà, donc nous les portons dans notre prière, et puis nous rendons grâce avec eux.

HOMELIE :

« A vous, il est donné de connaitre les mystères du Royaume des Cieux, mais ce n’est pas donné à ceux-là. » Il y a donc deux catégories de personnes : ceux qui connaissent les mystères du Royaume des Cieux, et ceux qui ne les connaissent pas. Mais, qui sont ceux qui peuvent connaitre ces mystères du Royaume des Cieux ? Nous l’avons entendu, ce sont ceux qui s’approchent de Jésus et qui cherchent à comprendre.

Nous avons là tout l’enjeu de l’Évangile qui est tout l’enjeu de notre vie. Et alors, la question se pose à nous, nous approchons-nous de Jésus pour chercher à connaitre les mystères du Royaume des Cieux ? Interrogeons-nous Jésus sur le sens de ses paroles, ou les laissons-nous couler sans qu’elles viennent pénétrer au profond de nos cœurs ? Ce que dit Jésus est trop énigmatique, donc je laisse couler, je vais voir ailleurs, je passe à autre chose.

Par cet Évangile, Jésus nous montre qu’il est sans illusion sur les dispositions de notre cœur, et sur le succès de sa mission sur terre. Parce que, dans cet Évangile, Jésus parle en fait de lui. Il parle DU semeur qui est sorti pour semer. Il ne parle pas d’un semeur en général : « Voici que LE semeur sortit pour semer. »

Il est sorti du Père pour nous rejoindre. Jésus répand sa Parole sur tous, largement. Mais, sa Parole, comme le grain, tombe sur des cœurs, pour la plupart, bien peu aptes à la recevoir, quand ce n’est pas l’ennemi lui-même qui vient purement et simplement dérober le grain de la Parole. Voilà pourquoi dans sa prière, Jésus terminait par cette demande : « Délivre-nous du mal. » C’est-à-dire, délivre-nous du mauvais, du malin, de l’ennemi, qui justement arrache le grain de la Parole.

Jésus aurait pu se décourager du peu de succès que remporterait sa mission. Mais non, parce qu’il savait aussi que ceux qui accueilleraient sa Parole, dans un cœur bien disposé, porteraient un fruit abondant et merveilleux : « cent, soixante, trente pour un ».

Ce qui est vrai pour Jésus se vérifie aussi pour l’Église. Lorsque nous suivons le parcours de Saint Paul, dans les Actes des Apôtres, nous ne pouvons qu’être saisis par la manière dont se sont passées ses prédications, lui, l’apôtre des nations. Partout il rencontre l’opposition, il se fait chasser des synagogues, chasser des villes, il se fait pourchasser.

Une fois il est parti à 150 kilomètres, et on va le pourchasser. Quand à l’époque il fallait bien cinq jours de voyage, eh bien on va le retrouver pour l’expulser encore plus loin. Il se fait lapider, bref, il va d’échec en échec. Et pourtant, un petit nombre accueille à chaque fois la Parole, et dans tous les endroits où il est passé, une Église est née.

Il en est de même pour nous aujourd’hui. Nous voudrions que tous les voyants soient au vert pour pouvoir témoigner de l’Évangile. Non ! Il nous faut annoncer la Parole à temps et à contretemps. Notre mission à nous, c’est de lancer la Parole à la suite de Jésus, à la suite de Saint Paul. La mission de Dieu, ce sera de la faire germer dans les cœurs, et quand Dieu est à l’œuvre, elle germe là où on s’y attendrait le moins.

A qui s’adressait Jésus ? Aux Juifs, c’est-à-dire à des gens profondément croyants, à des pratiquants. Et pourtant, le résultat n’a pas été au rendez-vous. Pourquoi ? Jésus donne la réponse en citant le prophète Isaïe : « Le cœur de ce peuple s’est alourdi. » « Mon amour, c’est mon poids, a dit Saint Augustin, si mon cœur m’entraine vers la terre, il s’alourdit. S’il tend vers le haut, vers le Royaume, il s’allège. »

Alors, je renouvelle ma question du début, à nous qui, comme les auditeurs de Jésus, somment pour la plupart profondément croyants, pratiquants. Nous approchons-nous de Jésus pour chercher à connaitre les mystères du Royaume des Cieux ? Combien de temps consacrons-nous chaque jour à nous approcher de Jésus, à chercher à mieux le connaitre ?

Nous constatons que ce sont plutôt les publicains et les pécheurs qui ont ouvert leur cœur à la Parole de Jésus. Saint Jean-Paul II rappelait dans sa lettre apostolique « Dies domini » (le jour du Seigneur) : « Si la lecture du texte sacré, faite en esprit de prière et avec fidélité à leur interprétation ecclésiale, n’animait pas, habituellement, la vie des personnes et des familles chrétiennes, il serait difficile que la seule proclamation liturgique de la Parole de Dieu puisse porter les fruits espérés. »

Autrement dit, si nous nous contentons d’écouter la Parole de Dieu à la messe du dimanche, Saint Jean-Paul II nous dit : « eh bien, il y aura très peu de fruits. » Il nous faut, chaque jour, lire le texte sacré « en esprit de prière, dans la fidélité à l’interprétation ecclésiale ». C’est un travail de chaque jour, comme le travail de l’agriculteur.

Alors, je vous propose un petit challenge pour ce temps des vacances où, par définition, nous avons du temps. C’est de prendre six minutes, six minutes chaque jour, pour lire, alors non pas avec notre intelligence, mais avec notre cœur, pour lire un ou deux versets de l’Évangile. Je ne dis pas de lire une page entière. Un ou deux versets, à savourer avec le cœur pendant six minutes.

Ne cherchez pas à comprendre. Laissez simplement cette Parole s’infuser dans votre cœur, ça suffira, et le Seigneur fera son travail. Peut-être qu’au début ce sera un petit peu difficile, notre cœur nous apparaitra comme un sol pierreux. Mais, si nous persévérons, le sol s’amendera, la terre deviendra plus souple, plus profonde. Et nous aurons la joie de gouter le fruit que le Seigneur fera germer dans notre cœur, un beau fruit savoureux et abondant, portant « trente, soixante, cent pour un ». Et surtout, nous découvrirons que Jésus est présent dans notre cœur, que c’est lui qui parle à notre cœur, et que sa Parole est une Parole de vie.

AMEN