1er DIMANCHE DE L’AVENT C 1er décembre 2024
1 décembre 2024
- Frère Yves FRÉMONT
Accueil
Nous sommes heureux d’accueillir ce matin, dans l’assemblée, des Scouts de France, et puis le groupe qui se forme à l’accompagnement spirituel. C’est pour cela que nous avons deux diacres qui sont avec nous ce matin. Et puis il y a quelques femmes aussi qui sont dans l’assemblée et qui suivent cette formation avec le Frère Jean-François.
L’Église nous invite, en ce début d’année liturgique, à être dans cette attitude de l’attente. Attendre, c’est difficile d’attendre. Et c’est ce que l’Église nous demande, d’attendre la réalisation des promesses de Dieu. C’est ce que nous verrons dans les lectures de ce jour. Et la pédagogie de l’Église, c’est de nous apprendre à avoir cette attitude mariale, cette attitude de Marie qui a su, non seulement attendre, mais aussi accueillir les promesses de Dieu. Eh bien, que cette célébration nous aide, nous accorde cette grâce d’accueillir aujourd’hui Jésus qui vient nous rejoindre dans cette assemblée.
Homélie
Reprenons les lectures que nous venons d’entendre. Dans le livre de Jérémie : « Parole du Seigneur, voici venir des jours où j’accomplirai la promesse de bonheur. » Promesse donc d’une bonne nouvelle, celle qui a été faite à David par le prophète Nathan : « Lorsque tes jours seront accomplis, David, et que tu seras couché avec tes pères, j’élèverai ta descendance après toi. Ta maison et ta royauté seront à jamais stables, ton trône à jamais affermi. » Promesse de Dieu à David. Alors, le peuple d’Israël en déduisait que la dynastie de David règnerait à perpétuité.
A l’échelle humaine, la réalité a été toute autre. Les rois qui se sont succédé sur le trône de David, après lui, ont été, pour la plupart, décevants. Ainsi, de roi en roi, de siècle en siècle, de déception en déception, on reportait indéfiniment l’attente de cette promesse d’une dynastie de rêve. Et ce qui est pire que tout, c’est que le texte que nous lisons aujourd’hui, a été écrit au moment où il n’y avait plus du tout de roi sur Israël. Par conséquent, l’accomplissement des promesses de Dieu devenait un véritable défi pour la foi d’Israël. La Parole de Dieu semblait en échec.
Et pourtant, Dieu ne peut pas manquer à sa promesse, ce n’est pas possible. Alors, la question se pose aussi pour nous aujourd’hui. Croyons-nous vraiment que notre monde est en marche vers la réalisation de cette promesse divine, vers la réalisation du Royaume de Dieu ? Les apparences, dans notre monde, ne sont-elles pas contraires ?
C’est justement quand il fait nuit qu’il devient nécessaire de s’accrocher à la foi. Notre fondatrice, Mère Marie de la Croix, avait cette formule : « Il faut s’acharner à croire. » Il faut s’acharner à croire, car ce n’est pas évident la foi dans les promesses de Dieu.
Le psaume 24 que nous avons entendu, évoque une situation d’angoisse, peut-être celle de l’exil à Babylone, ce qui invite, bien sûr, dans ces moments difficiles, à la prière. N’oublions pas que prier, c’est la même racine que précarité. Alors, avec nos pauvretés, tournons-nous d’abord vers Dieu, et lui nous libèrera des situations difficiles. Le psaume nous dit : « Le secret du Seigneur est pour ceux qui l’aiment. A ceux-là, il fait connaitre son alliance. »
Dans la lettre de Saint Paul aux Thessaloniciens, nous retrouvons une bonne nouvelle, là aussi. Saint Paul vient d’évangéliser Thessalonique. Mais, les Juifs qui n’adhèrent pas au Christ, se sont arrangés avec les dignitaires de Thessalonique pour que Paul quitte la ville. Ce qu’il fait, parce qu’il est en danger.
Et Timothée qui est envoyé, quelques temps plus tard, vers Thessalonique, pour voir ce qu’est devenue cette jeune chrétienté qu’il avait formée, apprend cette bonne nouvelle qu’elle tient bon. Alors Saint Paul dans le passage que nous venons d’entendre s’en réjouit. Et il dit aux chrétiens de Thessalonique, en gros ceci : il ne vous reste plus maintenant qu’à persévérer dans cette foi en Jésus Christ.
C’est bien là le projet de Dieu qui donne sens à notre histoire. C’est bien ça que nous sommes en train de vivre dans le temps de l’Avent. C’est de remettre en perspective par rapport à la finalité de notre existence, nous attendons ce fameux Roi. Dans ce monde qui ne sait plus très bien où il va, notre défi chrétien, c’est de vivre toute notre vie dans l’attente. Il faut attendre ce jour où notre Seigneur Jésus viendra avec tous les Saints du Ciel.
C’est également le sens de la prière qui suit, dans le Notre Père, dans la liturgie de la messe. Qu’est-ce que dit le prêtre aussitôt après le Notre Père ? Il dit ceci : « Rassure-nous devant les épreuves en cette vie où nous espérons le bonheur que tu promets », c’est –à-dire l’avènement de Jésus Christ.
Concrètement, vivre dans l’attente de la réalisation du Royaume, c’est vraiment un défi. Et nous ne pouvons pas y arriver tout seul. C’est un don de Dieu. On n’y arrive pas à la force du poignet. Aussi Saint Paul dit à ses frères : « Que Dieu vous donne, entre vous et à l’égard de tous les hommes, un amour de plus en plus intense et débordant. »
Et cet amour, ce n’est pas un amour humain. C’est un amour qui vient de Dieu. C’est la grâce, c’est la charité, c’est la vertu de charité qui est une vertu théologale, qui vient de Dieu, qui dispose, dans notre cœur, le propre Amour de Dieu, lui-même, dans nos cœurs.
L’Évangile, lui, nous plonge dans le genre littéraire qu’on appelle apocalyptique. Nous savons qu’il ne faut pas prendre ce style au premier degré. Traduisons « texte apocalyptique », par « texte de révélation ». Ce genre littéraire a au moins quatre caractéristiques. On l’a beaucoup entendu la semaine dernière, on l’entend encore aujourd’hui.
La première de ces caractéristiques, ce sont des livres pour temps de détresse, généralement de guerre et d’occupation étrangère, doublées de persécutions. Ce livre est écrit dans cet esprit-là, dans un moment très dur pour le peuple. Dans ce cas, les persécuteurs sont évoqués sous les traits de monstres affreux, des bêtes, des monstres qui sortent de la mer… Du temps des premiers chrétiens, c’était l’empire romain. Et on ne pouvait pas le nommer, sinon c’était encore pire. Alors, on prend des images et on décode. Dans ce cas, le lecteur vit ces évènements très angoissants, et comprend le texte au deuxième degré.
Deuxième caractéristique, ce sont des livres de consolation, pour conforter les croyants dans leur fidélité, et leur donner des motifs de courage et d’espérance. Ces livres invitent à tenir bon dans les moments difficiles.
Troisième caractéristique de ces livres, ils révèlent la face cachée de l’histoire. Cachée. Il y a ce qu’on voit dans nos actualités, dans nos journaux, et puis il y a une face cachée de l’histoire. Et le chrétien, lui, s’intéresse à la face cachée de l’histoire. Il annonce la victoire finale de Dieu. Il parle de l’installation d’un monde nouveau, celui du Royaume. Le chamboulement cosmique est une image symbolique du renversement complet de la situation. Le message qu’il délivre c’est : Dieu aura le dernier mot.
Et puis, quatrième caractéristique de ces livres apocalyptiques, c’est qu’ils invitent les croyants à opter pour une attitude, non pas d’attente passive, mais d’attente active. Le quotidien doit être vécu à la lumière de cette espérance du Seigneur qui vient. Ce que nous vivons aujourd’hui prépare ce que nous vivrons quand le Christ viendra définitivement dans notre vie. Et pour nous, c’est moins de cent ans, c’est sûr. On rencontrera Jésus Christ. L’Avent nous prépare à cette rencontre.
Alors, Jérémie aujourd’hui, Saint Paul, l’Évangile nous invitent à une attitude de témoignage, celui de la foi avec Jérémie : attendre la réalisation de la promesse divine au-delà des apparences contraires. Le fait que nous soyons réunis ici, comme tous les autres chrétiens dans le monde, témoigne que nous espérons au-delà des apparences, et nous continuons à adhérer et à rencontrer Jésus Christ. Ça c’est un témoignage de foi, par notre présence ici, à notre monde.
Témoignage aussi de la charité avec Saint Paul : « Que le Seigneur vous donne, à l’égard de tous les hommes, un amour de plus en plus intense et débordant. » Dans un monde qui est plutôt parfois un peu gris, eh bien, nous sommes invités par Saint Paul à aimer, aimer ce monde tel qu’il est.
Témoignage aussi de l’espérance dans l’Évangile. Dans le livre de l’Apocalypse, il est dit : « Redressez-vous, relevez la tête, vous serez dignes de paraître debout devant le Fils de l’homme. »
Eh bien, que ce triple témoignage soit pour nous ce beau programme que nous allons vivre durant le temps de l’Avent. Et puis, dans l’instant, accueillons le Christ qui vient dans cette Eucharistie. Dieu réalise sa promesse là, aujourd’hui, pour nous. Ce Roi, il est là, au milieu de nous. Il est bien de la dynastie de David, et son règne est stable, il ne bougera plus.
Bénissons le Seigneur, et poursuivons cette célébration, heureux d’entrer dans ce projet de Dieu.
AMEN