29e Dimanche du Temps Ordinaire B, 20 octobre 2024
20 octobre 2024
- Frère Jean François CROIZÉ
Accueil :
En ce 29ème dimanche du temps ordinaire, nous avons la joie d’accueillir parmi nous des confirmands d’Angers Outre Maine avec leur Pasteur, le Père Jean-Paul, et leurs accompagnateurs. Nous accueillons aussi des Guides de Laval qui ont passé la nuit sous la tente, et vous tous bien sûr.
Nous prions particulièrement pendant cette messe pour Bruno Viot et Christian Risselin dont la famille est ici présente. Nous les portons dans notre prière.
Homélie :
Chers frères et sœurs, permettez que je m’adresse peut-être plus particulièrement aux confirmands, aux jeunes, aux Guides. Bien entendu, ça peut vous concerner aussi.
Vous savez qu’au mois de janvier, le Pape François a inauguré une année de prière, dans la perspective du Jubilé de 2025, appelant les fidèles à prier avec plus de ferveur pour nous, et pour nous préparer à vivre correctement cet évènement plein de grâces, et à expérimenter la force de l’espérance de Dieu. Cette année de prière, a expliqué le Saint Père, est consacrée à la redécouverte de la grande valeur et de l’absolue nécessité de la prière, de la prière dans la vie personnelle, dans la vie de l’Église, de la prière dans le monde.
A Rome, en ce moment, pendant ce mois d’octobre, l’Église est en réflexion, dans la deuxième Assemblée Générale ordinaire du Synode sur la synodalité. Après cette énumération, comment ne pas se sentir concernés, dans l’Église et personnellement, par la confession de foi et la transmission de foi ?
C’est précisément ce que ce temps de retraite de votre Confirmation va vous aider à prendre conscience. Nous pourrions par exemple formuler cette question : Qu’est-ce que l’Esprit-Saint me demande personnellement comme engagement, pour faire connaitre et aimer Jésus ? C’est une question fondamentale.
A partir de ce que chacun peut formuler dans son cœur, accueillons le regard de foi sur la grâce et la miséricorde du Seigneur, dans sa Parole que nous venons d’entendre. Et dans un deuxième temps, demandons-nous si nous avons la force de caractère, la force d’âme de Jacques et de Jean qui sont décidés à obtenir les premières places, dans le Royaume de Dieu.
Pour commencer, il est bon de se redire la parole du Psalmiste : « Le Seigneur veille sur ceux qui ont foi en Dieu, qui le craignent, sur ceux qui espèrent son amour. » Il n’est donc pas question de la crainte du monde, mais de Dieu, dans le sens de la piété filiale. Ça fait partie des dons de l’Esprit Saint. Et l’Amour de Dieu, en réponse à la foi, nous est offert dans sa grâce et sa miséricorde. C’est ce qu’on appelle le Salut.
Comment le prophète Isaïe, dans la première lecture que nous avons entendue, comment nous présente-t-il le Salut ? Curieusement nous assistons à un jugement bien particulier, celui d’un homme qu’Isaïe nomme Serviteur, dont la mort ne relève pas d’une condamnation pour crime, ni d’une erreur judiciaire. Mais, dans la foi, la confiance, ce Serviteur se fait don et se livre lui-même à la mort et s’offre comme victime. Il est donc présenté dans un acte liturgique. Il a fait de sa vie un sacrifice d’expiation, pour les péchés de son peuple.
Plusieurs siècles avant le Christ, le portrait du Serviteur d’Isaïe sera pour certains étonnant, pour d’autres une effrayante révélation où, à cette époque et jusqu’à l’époque du Christ, ce sont les animaux que l’on offre en sacrifice d’expiation. Mais le regard d’Isaïe voit davantage et plus loin, car ce Serviteur est le Serviteur du Seigneur, « le juste, mon serviteur », celui qui pénètre par la mort dans un état de gloire. « Il verra la lumière, il sera comblé ». L’épreuve de la souffrance et de la mort aboutit, pour lui, à la lumière de gloire, à un état glorieux.
Quels sont les effets de cet acte liturgique, de l’offrande de sa vie ? Pour Isaïe c’est chose claire. Par la mort et les souffrances du Serviteur, l’œuvre de Dieu se réalisera, car il procurera à des foules immenses, pardonnées de leurs péchés, la véritable sainteté, la justice. « Le juste, mon serviteur, justifiera les multitudes, il se chargera de leurs péchés. » Voilà donc le portrait du témoignage de foi d’un homme présenté par Isaïe.
Lorsque je vous ai demandé de penser à ce que l’Esprit-Saint vous demande pour faire connaitre et aimer Jésus, vous est-il venu à l’esprit une telle vocation ? Est-elle imitable ? Et comment dans l’Évangile ne pas recevoir comme en écho d’Isaïe, la révélation de Jésus sur lui-même ?
La dernière phrase de notre Évangile est une affirmation explicite de Jésus sur sa destinée. Il se présente comme Fils de l’Homme et comme le Serviteur, un Serviteur libre dans l’acte liturgique de donner librement sa vie, plus qu’on ne le lui prend. Il livre sa vie en rançon pour la multitude des hommes, et c’est bien ce que le prêtre annonce avant la Communion eucharistique : « Voici l’Agneau de Dieu, voici Celui qui enlève les péchés du monde. »
En effet, Jésus est en chemin vers Jérusalem, suivi par ses disciples, mais qu’est-ce que Jérusalem pour le disciple, sinon la cité royale de David ? Le Fils de l’Homme qui doit se manifester dans sa gloire, connaitra auparavant les humiliations du Serviteur.
La lettre aux Hébreux, c’était la deuxième lecture, achève et complète notre regard de foi, dans la contemplation de l’exercice liturgique du Serviteur, le Fils de l’Homme, Jésus, le Fils de Dieu. C’est lui le grand Prêtre par excellence, qui fait grâce et miséricorde, vers lequel il nous faut avancer avec foi, confiance et assurance. Voilà le mystère de notre foi.
Nous avons donc dans nos lectures le résumé de notre foi, ce que l’on appelle le kérygme : le Seigneur Jésus, Serviteur souffrant, grand Prêtre, mort et ressuscité, maintenant dans la gloire. Puisque nous sommes les bénéficiaires de sa Grâce et de sa Miséricorde en réponse de notre foi, il nous est donc demandé de témoigner de notre foi. Voilà l’enjeu de la nouvelle évangélisation pour la transmission de la foi.
Et pour cela, il n’y a pas de temps de retraite, c’est-à-dire où on se retourne sur soi-même. Alors qu’est-ce qu’il faut faire et qu’est-ce qu’il ne faut pas faire ?
D’abord qu’est-ce qu’il ne faut pas faire ? Eh bien ne pas s’endormir bien sûr. Nous avons encore en mémoire les exigences de Jacques et de Jean. Ils sont aussi avisés que courageux, mais téméraires. Les ambitions à des fins personnelles, en dehors de la collégialité de la communion, ne sont pas bonnes conseillères.
Or précisément, ils venaient d’entendre ce que nous avions entendu les dimanches précédents, et que nous avons sans doute oublié. Jésus, entre deux annonces de sa Passion, condamne les fauteurs de scandales, la répudiation, le divorce. Il souligne l’incompatibilité entre les richesses et son Royaume, et donne en exemple un enfant, que l’on peut traduire serviteur. Le résultat de ce qu’il ne faut pas faire entraine la désappropriation de Jésus et la division chez les disciples, donc rien de bon.
Alors qu’est-ce qu’il faut faire pour la transmission de la foi ? Je crois qu’il faut faire quand même comme Jacques et Jean, en ce sens qu’ils ont répondu à l’appel de Jésus. Ils ont cru en lui, ils l’ont suivi. De plus, ils ont fait l’expérience de la limite de leur compréhension, de la violence de leurs désirs et des exigences de leur témérité. Mais cela, ce n’est pas catastrophique, ça fait partie de notre condition humaine.
Et pour la dépasser il faut accepter, comme eux, l’épreuve de la confrontation avec Jésus, le face à face. Et comment cela se passe-t-il ? Ça se passe très bien, car lorsque Jésus donne une leçon d’humilité, il adopte lui-même l’attitude du Serviteur doux et humble de cœur. Il relève, il n’écrase pas. Jacques et Jean ont accueilli cette conversion de la vocation humaine, dans ses revendications, en vocation missionnaire, pour devenir par la volonté de Dieu les colonnes de l’Église, la primauté au service du don de la vie.
En conclusion, la grâce et la miséricorde, auxquelles le Seigneur nous invite, ne seraient-elles pas le passage de la couronne de laurier de nos amours propres humains, à l’accueil et à l’amour de la Croix que le Seigneur nous propose de porter à sa suite, pour notre propre Salut et celui de nos frères ?
La Vierge Marie nous guide sur ce chemin de conversion. Redisons avec elle : « Je suis la Servante du Seigneur, qu’il me soit fait selon ta Parole. »
AMEN