3e DIMANCHE du Temps Ordinaire C 26 janvier 2025
26 janvier 2025
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Frère Yves FRÉMONT
Accueil
Nous sommes entrés aujourd’hui solennellement avec la Parole de Dieu, puisque c’est le dimanche de la Parole, institué par le pape François en 2019, non pas pour avoir un dimanche supplémentaire avec un thème particulier, mais juste pour nous sensibiliser à cette place particulière de la Parole de Dieu, dans notre vie.
Homélie
Dimanche de la Parole de Dieu, il est probable que les textes, par eux-mêmes, nous disent l’importance de cette Parole.
Dans la première lecture (Ne 8,2–10), nous sommes au Vème siècle avant JC et nous sommes dans une période difficile pour le peuple d’Israël. En effet, le siècle précédent, les juifs ont connu un exil qui a laissé des cicatrices et le retour de Babylone a été aussi très difficile. En ce sens que ceux qui rentraient au pays trouvent les lieux occupés, soit par de nouvelles populations qui avaient été déplacées et qui avaient pris possession du terrain, soit par des Juifs qui avaient, vaille que vaille, survécu. Par conséquent, ceux qui rentrent d’exil, tout exaltés par la parole des prophètes qui leur disaient : « Vous allez rentrer au pays. » eh bien, ils y sont rentrés, ils étaient tout heureux, ils pensaient que tout allait bien se passer au retour. Mais, cela a été très, très difficile. En ce sens, que pour reconstruire le Temple, beaucoup ont mis des bâtons dans les roues, pour empêcher cette reconstruction du Temple. Oh ! Il ne sera plus aussi beau que celui de Salomon, mais le Temple a été rebâti.
Les Juifs ont retrouvé leur pays, et puis, ils ont même retrouvé leur ville sainte, Jérusalem. Il leur manque une chose, une âme qui les unisse, il leur manque la Parole. Par conséquent, le grand prêtre Esdras profite d’une occasion exceptionnelle. On a retrouvé un exemplaire de la Torah, miraculeusement rescapé des flammes et de la destruction des Perses. Alors il décide d’organiser une grande fête pour le peuple et en fait une lecture depuis l’aube jusqu’à midi pour les parents, les pères, les mères, les enfants en âge de comprendre. Et on lit le texte en Hébreu, c’est comme si je parlais en ce moment en Latin ; c’est-à-dire que le peuple ne comprend rien. A l’époque, on parle Araméen et depuis longtemps. Donc, il faut des traducteurs, et non seulement des traducteurs, mais aussi des commentateurs qui expliquent la Parole qui est lue. Et, ce qui est exceptionnel dans le passage que nous venons d’entendre en ce dimanche de la Parole, c’est que la réaction du peuple est bouleversante : « Ils pleuraient tous en entendant les paroles de la Torah. »
Ils étaient touchés au cœur par cette Parole. Alors, effectivement, on peut se poser la question quand nous lisons la Parole, si on la lit c’est qu’on l’aime mais peut-être qu’on vient le dimanche à la messe bon… parce que c’est jour de précepte, il faut venir à la messe et puis…pas trop long !
Mais là, ce qui est étonnant et ce qu’il faut que nous gardions dans le cœur, c’est qu’on peut être touché au plus intime de soi par cette Parole. Nous pouvons demander aujourd’hui cette grâce de pouvoir être touchés par la Parole de Dieu. Et puis, deuxième chose très importante dans cette journée de fête Eh Bien, Esdras dit : « Ne prenez pas le deuil. »
Alors que ça ne va pas trop bien dans le peuple, c’est comme aujourd’hui, quoi, c’est un peu le bazar, vous voyez c’est-à-dire que les Juifs se marient avec des païens, on se demande où va la Foi, qu’est ce qui va en rester. Voilà, on est dans cet esprit-là. Et donc là il leur dit, au lieu de leur dire : « Faites attention, écoutez bien la Parole de Dieu et surtout mettez la en pratique. » Non là, Il ne leur dit pas ça, il leur dit : « Ne prenez pas le deuil, mangez, buvez, partagez, ne vous affligez pas car la joie du Seigneur est votre rempart. »
C’est à dire si vous mettez la Parole de Dieu dans votre vie, allez de l’avant, allez de l’avant. Parce que quand Dieu parle, c’est Dieu qui se donne dans cette Parole, ce n’est pas une parole comme nous, on dit quelque chose, mais est-ce vraiment notre conviction profonde ? Pas sûr ! Hein, tandis que Dieu, quand il parle, c’est Lui qu’il donne, donc Tout Dieu est dans sa Parole et quand nous la recevons, c’est Dieu que nous recevons dans la Parole.
Alors, le psaume 18 que nous venons d’entendre clame cette vérité : « La Loi du Seigneur est parfaite, elle redonne vie. La charte du Seigneur est sûre, elle rend sage les simples. Les préceptes du Seigneur réjouissent le cœur, … ils clarifient le regard ». Je pense à cette chose où il vient d’être dit : « Il rend sages les simples. » Les simples vont à la messe le dimanche. Les autres disent « j’ai autre chose à faire, j’ai des choses importantes. » Quelle sagesse de venir le jour du Seigneur se recevoir de Dieu, c’est sage ! Ça, les simples le comprennent très bien. Ces paroles insistent sur le rôle essentiel de la parole de Dieu : Dieu nous éduque, il nous ouvre le chemin pour vivre heureux ensemble. La Parole est un instrument de liberté. Il n’y a aucune ombre de domination de la part de Dieu quand Il nous parle. « Je suis le Maître, écoutez-moi » Non, jamais Jésus ne fait ça. D’ailleurs, avec la sortie d’Égypte, Il a prouvé que son seul objectif est de libérer le peuple, de le libérer.
Nous pouvons réécouter ici ce passage du Deutéronome qui concerne cette parole : « Demain, quand ton fils te demandera pourquoi ces exigences, ces lois et ces coutumes que le Seigneur votre Dieu vous a prescrites ? Alors tu diras à ton fils : nous étions esclaves du Pharaon en Égypte, mais d’une main forte, le Seigneur nous a fait sortir d’Égypte… Le Seigneur nous a ordonné de mettre en pratique toutes ces lois et de craindre le Seigneur notre Dieu, craindre ici signifie qu’il nous aime, pour que nous soyons heureux tous les jours et qu’il nous garde vivants comme nous le sommes aujourd’hui » (Dt 6, 20–24). Donc si on écoute bien ce passage, le plus court chemin pour être un peuple libre et heureux, c’est une vie droite, une vie conforme à la volonté de Dieu. Aujourd’hui, comme hier, nous retrouvons les éternelles tentations de l’humanité : l’idolâtrie de l’argent, l’injustice sociale, les prises de pouvoir des uns sur les autres. Jésus nous laisse sa loi nouvelle : « aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés ».
L’épître de Saint-Paul aux Corinthiens apporte un éclairage nouveau et complémentaire sur ce partage de la Parole de Dieu : « Prenons une comparaison, dit l’Apôtre : notre corps forme un tout, il y a pourtant plusieurs membres ; et tous les membres, malgré leur nombre, ne forment qu’un seul corps. Il en est ainsi pour le Christ. Tous, Juifs ou païens, esclaves ou hommes libres, nous avons été baptisés dans l’unique Esprit pour former un seul corps.… L’œil ne peux pas dire à la main : « je n’ai pas besoin de toi » ; la tête ne peut pas dire aux pieds : « je n’ai pas besoin de vous ». Bref ! À travers nos diversités, à travers le caractère unique de chacun, nous faisons partie d’un même corps celui du Christ. Autrement dit : tout le monde a besoin de tout le monde, pour vivre harmonieusement notre vie d’enfants de Dieu. C’est important de prendre conscience qu’on est chrétien en communauté parce que, chacun a une note à apporter pour une vision d’ensemble.
Pas un instant dans ce texte, Paul ne parle en termes de hiérarchie ou de supériorité. Au contraire, il insiste sur le respect dû à tous, tout simplement parce qu’ils sont dignes d’appartenir au Corps du Christ. Retenons qu’il nous faut, à la fois, respecter nos diversités et à la fois respecter la dignité de chacun dans sa fonction. Le Bien Commun, c’est notre appartenance au Christ, c’est notre appartenance au Christ, c’est Lui qui est notre vie à tous et cela passe par le respect de la spécificité de chacun au service de ce corps.
Et dans l’évangile du jour, la Loi en personne, la Torah en personne, la Parole éternelle du Père se manifeste à la synagogue de Nazareth. Dieu fait homme arrive dans son village natal, à la synagogue. Tout le monde le reconnait, il est le fils de Joseph et de Marie. Et puis, il fait ce qu’il fait dans tous les villages où il passe. Le samedi, jour du sabbat, il va faire la lecture et le commentaire et donc il prend le livre d’Élie : « L’Esprit du Seigneur est sur moi… Il m’a envoyé porter la Bonne Nouvelle aux pauvres »… Ayant refermé le livre, Jésus se mit à dire : « Cette parole de l’Écriture, que vous venez d’entendre, c’est aujourd’hui qu’elle s’accomplit ».
Alors, je ne sais pas mais dans le village on connait quand même Joseph, on l’a connu enfant, il a joué avec nos enfants, il vient vous dire : « Je suis le Messie » Il y a dû y avoir un petit flottement dans l’assemblée, un petit temps de silence « qu’est-ce qu’il nous dit là ? » Effectivement pour tous ses contemporains, ce texte d’Isaïe qu’il venait de lire concernait le Messie et lui, Jésus, dit « aujourd’hui cette parole se réalise. Et c’est la vérité et voilà, ce n’est pas la Vérité qu’on attendait. Nous sommes surpris, aujourd’hui encore, aujourd’hui encore de la venue du Christ au milieu de nous, elle nous surprend. Oui pourtant c’est bien Lui, le Messie attendu mais tellement différent de celui que tous les Juifs imaginaient.
Et puis, sa mission est déjà exprimée : annoncer aux prisonniers qu’ils sont libres, aux aveugles qu’ils verront le Lumière, aux opprimés qu’Il apportera la libération. Et Il annonce une année de bienfaits accordée par le Seigneur. Nous aussi nous avons une année qui nous est accordée, une année jubilaire, accordée par le Seigneur.
Alors, retenons de ces passages bibliques qu’il nous faut nous réjouir de ces liens étroits avec Dieu, grâce à la médiation de sa Parole révélée. Cela nous donne l’occasion de saisir encore un peu plus profondément la réponse de Marie au moment de l’Annonciation : « Je suis la servante du Seigneur, qu’il me soit fait selon ta Parole. »