4e DIMANCHE DE PÂQUES (A) 2023
30 avril 2023
- Frère Marie-Jean BONNET
Accueil :
Nous venons de chanter « Peuple en marche vers le Dieu vivant, Jésus Christ est le bon Berger. Prends le chemin de son passage. N’aies pas peur, sa voix t’appelle jour après jour et te conduit. »
Dimanche du bon Pasteur, oui le Christ a ouvert le passage. C’est la Pâque, il a ouvert le passage vers la vie, en plénitude avec le Père. Dimanche des vocations parce que, nous qui sommes ses brebis, il nous faut écouter sa voix et répondre à cet appel particulier, personnel, qui est adressé à chacun. Car chacun est unique aux yeux du Père et aux yeux du Christ.
Entrons dans ce dimanche, dans l’action de grâce pour notre vocation. Notre premier devoir, c’est toujours de rendre grâce. Nous sommes débiteurs insolvables de la grâce de Dieu, du don gratuit de Dieu. Rendons grâce pour notre vocation personnelle, et demandons aussi de mieux la remplir, d’y être plus fidèles. Et d’abord rendons grâce pour le Baptême qui est l’appel foncier à la vie éternelle, que nous avons reçue.
Homélie :
C’est déjà aujourd’hui la soixantième journée mondiale de prières pour les vocations, puisqu’elle a été instituée par le Pape Paul VI, le 11 avril 1964. Et comme chaque année, le Pape, notre Pape François, nous adresse un message pour cette journée, que je veux tout simplement relayer. Donc ce message a pour thème : la vocation, grâce et mission. Comme je ne suis pas sûr que vous l’ayez lu, je pense que ce n’est pas superflu de la relayer et de vous inviter aussi à aller voir l’intégralité.
Et d’abord rappelons-nous que toute vie est vocation, parce que nous avons tous été appelés à cette vie qui passe, pour naître à la vie qui ne passe pas, comme dit Saint Augustin, pour naître à la vie éternelle qui est participation à la vie même de Dieu.
Nous venons d’entendre que Jésus appelle par son nom chacune de ses brebis. Nous sommes appelés, nous sommes uniques, chacun aux yeux du Seigneur, de notre Berger, et du Père bien sûr. Vocation personnelle et unique de chacun, aux yeux de Dieu.
C’est ce que l’apôtre Paul, en particulier, proclame dans la lettre aux Éphésiens que nous connaissons bien. « Dieu le Père nous a choisis dans le Christ, avant la création du monde. » Ça donne le vertige. Dieu pense à nous, à chacun de toute éternité, avant la création du monde. « Pour que nous soyons saints, immaculés devant lui dans l’amour. » Dieu nous a voulus de toute éternité. Quelle merveille quand on y pense ! Quelle sollicitude ! On n’y croit pas assez. Si on y croyait, on tomberait en apoplexie. « Il nous a prédestinés à être pour lui des fils adoptifs. » Prédestinés à être pour lui des fils et filles adoptifs, par Jésus le Christ. « Ainsi l’a voulu sa bonté. »
Et le Pape justement de nous inviter à redécouvrir, avec émerveillement, que cet appel du Seigneur est une grâce, un don gratuit. Nous ne méritons rien, tout est cadeau chez Dieu. Il ne s’agit pas de gagner son Ciel, tout est cadeau. Il s’agit de correspondre à l’amour, de répondre à l’amour, parce que l’amour de Dieu est infini et que le mépriser est grave. Mais tout est gratuit, il faut s’en émerveiller !
Nous avons été créés, déclare le Pape, nous avons été créés par l’amour avec un grand « A », par amour et avec amour, et nous sommes faits pour aimer. L’initiative et le don gratuit de Dieu attendent notre réponse. Bien sûr, quand on aime, on a soif de la réponse de la personne que l’on aime.
La vocation est l’entrelacement du choix divin et de la liberté humaine. Dieu appelle en aimant, et nous, reconnaissants, répondons en aimant. Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus, docteur de l’Église, avait perçu ça d’une manière fulgurante, vous le savez bien. C’est une de ses paroles les plus connues : « Ma vocation, enfin je l’ai trouvée, ma vocation c’est l’amour. »
Mais chacun de nous peut le dire : ma vocation c’est d’aimer. On est créés et on est voulus éternellement pour cela. Et on n’aura plus que ça à faire, et enfin on y arrivera. Aimer, tout notre être sera aussi dans l’amour. Quelle merveille quand on y pense ! On est faits pour ça, on a tant de mal à réaliser notre vocation à aimer. C’est dur d’aimer ici-bas, d’aimer dans la continuité, dans la fidélité, d’aimer tous et chacun. C’est dur, dur, dur, parce que le vieil homme est là, avec son orgueil et son égoïsme. Et un jour, enfin, nous pourrons réaliser notre vocation qui est la nôtre à tous d’aimer, d’aimer, par l’amour que nous recevrons de Dieu et que nous pourrons offrir à nouveau les uns aux autres.
Mais si le don de la vocation nous ouvre à Dieu, il nous ouvre, poursuit le Pape, aussi aux autres, pour partager avec eux le trésor que nous avons trouvé. L’appel de Dieu comprend l’envoi. Il n’y a pas de vocation sans mission. Et il n’y a pas de bonheur ni de pleine réalisation de soi, sans offrir aux autres la nouvelle vie que nous avons trouvée.
Voilà, on le ressent bien sûr ce feu. Si nous nous laissons vraiment brûler par la présence de Dieu, c’est comme un feu en nous. C’est Jérémie, si ma mémoire est bonne, qui disait : « Il y avait comme un feu en moi, je m’épuisais à le contenir. » Pourquoi ? Parce que Jérémie, comme tant d’autres témoins de Dieu et d’apôtres, évidemment, va essuyer pas mal d’échecs et de contradictions. Et il est tenté par le découragement. Comme bien d’autres avant lui, et comme bien d’autres après lui, il est tenté de dire : « Non ça suffit Seigneur, tu m’en demandes trop, j’arrête. » Mais, « c’était comme un feu en moi, je m’épuisais à le contenir. »
Oui, quand vraiment nous nous ouvrons à Dieu, il y a en nous comme… « L’amour du Christ nous presse » dit Saint Paul. L’amour du Christ nous presse, on ne peut pas le contenir.
Oui, il n’y a pas de bonheur, ni de pleine réalisation de soi… On parle beaucoup de réalisation de soi un peu partout. Voilà, la recette elle est là : il n’y a pas de bonheur, ni de pleine réalisation de soi sans offrir aux autres la nouvelle vie que nous avons trouvée, que nous avons reçue gracieusement et abondamment dans le Christ.
Et le Pape de rappeler que, il y a quelques années, il disait à chaque baptisé : « Toi aussi, tu dois concevoir la totalité de ta vie comme une mission. » La totalité de ta vie comme une mission. Oui, parce que chacun de nous sans exception peut dire : « Je suis une mission sur cette terre, et c’est pourquoi je suis dans ce monde. » Puisque chacun est unique, chacun a une mission unique. C’est prodigieux, c’est merveilleux, c’est… Mais personne ne peut remplir la mission personnelle, unique que nous recevons de Dieu.
La mission commune – malgré tout, il y a un point commun bien sûr à nos missions personnelles -, la mission commune à tous les chrétiens est de témoigner joyeusement, en toute situation, par des attitudes et des paroles, de ce que nous vivons en étant avec Jésus et dans sa communauté qu’est l’Église. Ce témoignage se traduit par des œuvres de miséricorde corporelle et spirituelle, par un style de vie accueillant et doux – pas facile -, capable de proximité, de compassion et de tendresse. Voilà les trois mots clés que le Pape nous répète souvent : proximité, compassion, tendresse. Que c’est difficile ! C’est pour ça que nous avons besoin de nous approcher du Christ pour nous laisser soigner et fortifier.
Un style de vie plein de proximité, de compassion et de tendresse, à contre courant de la culture du rejet et de l’indifférence qui s’étale aujourd’hui. Cette action missionnaire découle d’une expérience profonde avec Jésus. Voilà, cette relation vivante, personnelle avec le Christ, quotidienne. Ce n’est qu’alors que nous pourrons devenir les témoins de quelqu’un, d’une vie, et cela fait de nous des apôtres.
Le Pape ensuite nous rappelle la complémentarité, la beauté de toute vocation et la complémentarité de nos vocations respectives. La vocation, don de soi dans l’amour, commune à tous se déploie et se concrétise dans la vie des laïcs chrétiens, dans le témoignage des personnes consacrées, dans les ministres ordonnés. Ce n’est que dans la relation avec toutes les autres que chaque vocation, spécifique, dans l’Église, se révèle pleinement avec sa vérité, sa richesse propre. Voilà, ça rejoint, comment dire, les pistes de notre synode diocésain, voilà, complémentarité de nos missions.
En ce sens, l’Église est une symphonie vocationnelle, avec toutes les vocations unies et distinctes dans l’harmonie, et ensemble en sortie pour rayonner, dans le monde la vie nouvelle du Royaume de Dieu. Oui, le Pape a peut-être lu les orientations de notre Synode. En tous cas, ça se rejoint.
Je termine par ces mots : la vocation, il nous rappelle, est un don. Aujourd’hui, prenons le temps de remercier pour notre vocation. On le fait si on y pense, remercier pour notre vocation, en nous remettant devant les yeux toutes les grâces attachées à notre vocation. La vocation est un don et une charge, une mission, une responsabilité.
Alors demandons au Seigneur : Que dois-je faire ? Qu’est-ce qu’aujourd’hui, qu’est-ce que maintenant tu attends de moi ? C’était la question des auditeurs de Saint Pierre et de Saint Paul sur le chemin de Damas : « Seigneur, que veux-tu que je fasse ? »
La vocation est un don et une charge, une source de vie nouvelle et de joie véritable. Que l’Esprit du Seigneur ressuscité nous arrache à l’apathie qui nous menace toujours, l’apathie et nous donne la sympathie et l’empathie, afin que nous puissions vivre chaque jour régénérés en tant que fils de Dieu, fils du Dieu amour, et être à notre tour générateurs d’amour, capables d’apporter la vie partout, pour que, et il cite Saint Augustin : « les espaces de l’amour s’élargissent », que les espaces de l’amour s’élargissent, et que Dieu règne toujours plus dans ce monde.
AINSI SOIT-IL