ASSOMPTION DE LA S. VIERGE MARIE 15 août 2024 – Messe et procession

15 août 2024

  • P. Antoine Baron, prêtre du diocèse de Paris P. Antoine Baron, prêtre du diocèse de Paris

MESSE : Père Antoine BARON

Introduction : Avant de commencer cette Eucharistie, – je pense que la plupart d’entre vous ne me connaissent pas – je suis le Père Antoine, un petit prêtre du diocèse de Paris, ordonné il y a 40 ans, le 8 décembre 1984, à Notre Dame, la cathédrale Notre Dame. Dans la nuit du 14 au 15 août 1974, (ça ne nous rajeunit pas !), il y a 50 ans, ma conversion ici-même, au bout de l’allée centrale, à côté de la petite maison (ça doit être symbolique), m’a fait être le Frère Antoine, à la Cotellerie, du 6 octobre 1974 au 15 janvier 1981. Le Frère Jean-François, le Père Prieur, m’a prié de présider cette Eucharistie en ce jour anniversaire et en cette belle solennité de l’Assomption. Et vous devinez que je m’exécute avec joie.

Par ailleurs, je viens d’apprendre que j’ai l’honneur de porter la chasuble que Jean-Paul II a portée pour le millénaire du Baptême de la Pologne, à Czestochowa. Une grâce supplémentaire.

Homélie : Frères et sœurs, la solennité de l’Assomption de Notre Dame, c’est la prophétie en actes de la parousie, c’est-à-dire, c’est l’anticipation de la victoire finale du Christ ressuscité sur la mort. L’avènement du Ressuscité, au matin de Pâques, et son Ascension glorieuse à la droite du Père, où il siège désormais comme nouvel Adam d’éternité, apportent plein de fruits, mais surtout un fruit entre mille, quelques 18 ans après l’évènement, et cet évènement a été un Big Bang qui a renouvelé toute la Création, à Jérusalem, élévation glorieuse de sa Mère, corps et âme, dans la pleine communion trinitaire.

Et l’Esprit de Pentecôte, depuis ce jour-là, annonce en Marie la glorification finale de toute l’Église. Parce que si Marie est la Mère du Seigneur, la Mère de Dieu, c’est l’Église qui est la nouvelle Ève, corps et épouse du Rédempteur.

La France – nous ne sommes pas en Pologne, nous sommes en France – la France, dite encore Fille ainée de l’Église, parce que consacrée à Notre Dame par le vœu de Louis XIII, en 1638, ce vœu qui est réitéré chaque année, aujourd’hui, comme tous les ans, devant la cathédrale qui va bientôt rouvrir, le 8 décembre prochain. La France fait partie de l’Europe, au drapeau bleu ciel couronné de douze étoiles.

C’est une prophétie ou c’est une parodie ? S’agit-il de l’annonce de l’entrée ultime de la fille du roi dans la gloire du palais, comme nous l’avons chanté tout à l’heure, dans le Psaume : vêtue d’étoffes d’or, dans le cortège de ses compagnes ? Ou bien, s’agit-il, au contraire, du dernier assaut du Dragon rouge feu contre la Femme enfuie au désert avec ses enfants, celle dont l’enfant mâle a été enlevé au Ciel ? Je vous laisse juges, mais la question méritait d’être posée.

Une chose est sûre, le Christ en ressuscité et glorifié. Et il associe déjà la Mère du Rédempteur à sa victoire finale.

Alors, dans le ventre de sa mère qui s’appelait Élisabeth, le petit Jean-Baptiste exulte. Mais la mission du Baptiste qui clamait, dans le désert, son appel urgent à la conversion, cette mission n’est pas terminée ! Elle dure encore. Le véritable Israël de Dieu – je ne parle pas de l’Israël politique d’aujourd’hui qui zigouille des Palestiniens à plaisir, au mépris du droit international. Le véritable Israël de Dieu et toutes les nations de la terre sont appelés, à travers Élisabeth, à dire à Notre Dame : « Heureuse celle qui a cru à l’accomplissement des paroles qui lui ont été dites de la part du Seigneur ! » Car, c’est la vocation de toute l’Église qui se joue là.

Dans la dormition de Marie, assumant la mort, comme son Fils, jusqu’au tombeau, mais assumant la mort, dormition, à Jérusalem, près du Cénacle. Ceux qui ont été là-bas savent de quoi je parle. La dormition de Notre Dame devient…

Et c’est bien la prophétie en actes de l’achèvement ultime de la nouvelle et éternelle Alliance, par le Christ, en son Église, et pour toute l’Église du Christ. Et c’est pourquoi, le Magnificat que Saint-Luc met sur les lèvres et dans le cœur de la Vierge Marie, la Mère de Jésus, habite depuis 20 siècles la prière de toute l’Église, comme chez nous, ici, aujourd’hui.

Alors, de manière en fait spectaculaire, en plein milieu, mais pile au milieu, de l’horrible 20e siècle, dont la plupart d’entre nous ont fait la traversée, eh bien, le successeur de Pierre de l’époque, le Pape Pie XII, le 15 août 1950, a proclamé, à la face du monde, le dernier dogme de l’Église Catholique : l’Assomption de la Vierge.

L’Assomption de la Vierge, c’est l’apothéose de la dormition de Marie. Je vais le dire autrement. C’est le dévoilement, pour toute l’Église d’Orient et d’Occident, de ce que Dieu est en train de faire – alors pardon pour les deux gros mots que je vais employer – ce que Dieu est en train de faire en apocalypse eschatologique. C’est-à-dire, j’explique, c’est-à-dire en révélation déjà là, de ce qui, pas encore, ne va pas tarder à advenir. C’est plus simple comme ça.

De quoi s’agit-il ? La victoire du Christ et de son Église. On l’a entendu par la bouche de Saint Paul, le dernier ennemi qui sera anéanti, c’est la mort, car Dieu a tout mis, y compris la mort, sous les pieds du Christ ressuscité et de son Église.

Alors, pour conclure, j’en ris d’avance, permettez-moi de, une fois n’est pas coutume, de chanter un cantique que j’ai eu la joie d’inventer, il y a 20 ans, pour la basilique Notre Dame du Perpétuel Secours à Paris. La plupart connaissent la musique. Vous pouvez la fredonner en même temps que moi, mais faites attention aux paroles.

Avec tous les anges, avec tous les saints, soit ma louange, ô Jésus très saint.
Que dans ton Église, divin Rédempteur, sois mon assise et mon vrai bonheur.
Paix de mon âme, source de l’amour, toi Notre Dame du Perpétuel Secours,
guide ma vie, deviens mon soutien tu me réjouis quand vers toi je viens.

Oui, la Mère du Rédempteur et de son Église, c’est la mère du Christ total.

Alors là, j’ai sous les yeux, au-dessus de l’orgue, le Christ ressuscité, avec Notre Dame de Pontmain, aux vêtements pleins d’étoiles. Et puis vous avez sous les yeux, au-dessus du tabernacle, toutes les étoiles qui ont illuminé le ciel de Pontmain, le 17 janvier 1871, pour chasser les Prussiens de France, comme Jeanne avait chassé les Anglais, en 1429. C’est à peu près du même ordre. Et bien, vous vous demandez peut-être quelles sont ces étoiles. Et bien, bonne nouvelle c’est vous. AMEN

 

PROCESSION : Frère Jean-François

Nous venons de chanter à Notre Dame : « Réjouis-toi, Vierge Marie ». Dans la prière de notre chapelet, pendant notre procession, nous dirons : « je vous salue Marie ». Au fond, que disons-nous à Marie dans le « Je vous salue Marie » ? Certes, la première partie, c’est Dieu qui par la voix de l’ange, nous donne les mots pour la prier. Mais, dans la deuxième partie, c’est toute l’Église qui la prie. L’Ave Maria donc est une prière officielle de l’Église, depuis que la pape saint Pie V en a fixé définitivement le texte, en 1568.

Dans sa salutation, qu’est-ce que l’ange Gabriel a dit à Notre Dame ou qu’elle a entendu ? Probablement, le mot de sa langue maternelle à elle : « shalom », la paix. Et lorsque saint Luc s’adresse aux non-juifs, il traduit la salutation par « kaire », réjouis-toi. Et il nous faut l’entendre au sens de la Bible. Ce « réjouis-toi » qui est annoncé à notre Dame, a un sens de joie messianique. La joie, c’est lorsque Dieu est là, lorsque l’envoyé du Seigneur est présent. Celui que le Seigneur a consacré, le Messie, c’est celui que Dieu, oui, a consacré.

Et si une annonce de joie est faite à Marie, c’est parce que Dieu a envoyé celui que le peuple attendait depuis si longtemps, c’est-à-dire la joie du Salut qui est une joie tout à fait particulière, mais si profonde.

Et lorsque saint Jérôme va traduire à nouveau, mais en latin, cette fois, il écrit : « ave ». Le seul problème, c’est que « ave », ce n’est pas un mot latin. Il se trouve qu’effectivement, et les historiens nous le rappellent, les soldats romains, pendant les guerres puniques, contre les Carthaginois, ont importé ce mot « ave ». Et quand les Carthaginois se saluaient, ils prononçaient, non pas « ave », mais « awe », ce qui veut dire « ais la vie ».

« Ave » exprime donc la bienveillance de l’amour du Seigneur pour Marie. Ce n’est pas simplement le salut, « bonjour », si vous voulez, ou « la santé ». C’est beaucoup plus profond. La mission de Jésus, ainsi que saint Jean nous le dit au chapitre dixième de l’Évangile, verset 10 : « Il est venu, pour que les hommes aient la vie et la vie en abondance. »

Ce salut, ce souhait est d’abord réalisé en Marie. Ce qui n’est pas sans nous rappeler le livre de la Genèse, où Adam nomme son épouse Ève, ce qui veut dire « la vivante ». Et Marie est saluée comme celle qui est pleine de vie, à qui le Seigneur a donné d’être la mère de l’auteur de la vie. Et ce sont tous ces sens que nous avons à dire ensemble, lorsque nous disons le « Je vous salue Marie ».

C’est un souhait de paix, car le Seigneur est avec elle, dans son cœur, souhait de joie, car le Salut qui vient de Dieu, lui est donné. Et nous reconnaissons en elle la nouvelle Ève, par qui la vie nous est communiquée.

De même, le nom de « Marie », c’est un mot qui nous vient soit de l’égyptien, comme Miriam, Moïse ou Aaron, car ce sont des prénoms égyptiens, du temps où le peuple était en esclavage dans ce pays. Et auquel cas, « Marie » voudrait dire « la bien-aimée de Dieu ». Ou alors, « Marie » est un mot d’origine syrienne et auquel cas, « Marie » voudrait dire « l’épouse du souverain ». Nous en avons gardé l’expression, en français, par l’appellation de « Notre Dame » qui nous est si familière dans notre pays : Notre Dame de Pontmain, Notre Dame de France, Notre Dame de Lourdes, d’Avesnières…

Marie, c’est le prénom que ses parents lui ont donné, que les habitants de Nazareth lui donnaient. Mais cela n’est pas le prénom que Dieu lui a donné. L’ange ne lui a pas dit : « Je vous salue Marie. » C’est l’Église qui le dit, qui a rajouté le prénom. L’ange a dit : « Je vous salue pleine de grâces », « kekaritomene » en grec. Cette plénitude de grâces, sur laquelle les papes et les conciles se sont appuyés pour définir l’Immaculée Conception.

La grâce est une qualité féminine, pas seulement extérieur, mais aussi intérieure. Cela renvoie à la finesse, à la délicatesse, à la qualité de l’accueil, à l’harmonie des gestes et du corps. Et Marie est l’Immaculée, celle qui est toute pleine de grâces, l’épouse au sens accompli, car, en Marie, le dessein de Dieu sur l’humanité est accompli. Marie est celle qui, par excellence, répond à Dieu, en ce sens qu’elle accueille, en plénitude, la vie et la grâce, c’est-à-dire la sainteté. « La volonté de Dieu sur nous, c’est notre sanctification. » affirme saint Paul, en s’adressant aux Thessaloniciens.

Et alors, Notre Dame, parce qu’elle est Mère de l’Église, est précisément celle qui va travailler de façon à ce que, nous aussi, nous accueillions le dessein de Dieu et sa volonté sur nous, pour que nous devenions saints et immaculés, en sa présence, dans la charité. C’est ce que dit saint Paul au début de la lettre aux Éphésiens.

Pendant notre procession que nous allons faire, nous demandons à Notre Dame d’intercéder auprès de son Fils, pour qu’il nous envoie l’Esprit Saint, et nous en avons tant besoin, l’Esprit Saint et ses dons, pour que nous nous laissions conduire par lui, agir par lui. Ceux-là sont Enfants de Dieu qui se laissent conduire par l’Esprit Saint. Qu’elle nous obtienne ses yeux illuminés du cœur, pour que nous connaissions Jésus. Il n’y a pas de vie chrétienne sans connaissance profonde du Christ, sans amour profond du Christ. Afin que, nous aussi, un jour, en voyant le Père, le Père céleste, nous puissions voir dans ses yeux la joie qu’il a de nous bénir.

Que notre bénédiction à Marie nous revienne en bénédiction de Dieu.

AMEN